LesPAZAventures

Ruta 3 un jour, Ruta 3 toujours…

Et c’est reparti pour la Ruta 3… Nous nous dirigeons vers Comodoro Rivadavia, d’environ 660 m d’altitude à quelques kilomètres de la ville, la route redescend rapidement en lacets vers le bord de mer au milieu des collines de roches volcano-sédimentaires peu consolidées… Les abords de la ville sont très peu attrayants : on a l’impression que des quartiers champignons ont poussé à toute allure et de bric et de broc, au milieu des terrains arides jonchés de détritus, des derricks (pas l’inspecteur allemand, mais les puits de pétrole !) et des réservoirs d’or noir… La traversée de la ville sur la Ruta 3 est longue et pénible : la circulation est dense, et la ville nous paraît très sale et poussiéreuse et ne nous donne pas du tout envie de faire escale. 

Nous préfèrerons la banlieue sud, plus « chicos » et moins dense de Rada Tilly (mais assez «chèros »). Nous profiterons de cette halte pour faire « réparer » notre pare-brise par un professionnel qui, à défaut de pouvoir réinjecter de la résine dans notre poc, ajoutera un point d’arrêt à la fissure pour éviter qu’elle ne s’agrandisse encore plus…

rada tilly

docteur parabrisa

Peu après Comodoro Rivadavia, nous changeons de province et nous passons du Chubut à la dernière province de Patagonie, le Santa Cruz. La petite 100 aine de kilomètres qui sépare Comodoro Rivadavia de Caleta Olivia est dans un état désastreux : alors que l’on aperçoit par endroit une nouvelle route en construction à côté de la route actuelle et que de nombreux panneaux indiquent des travaux en cours, nous ne voyons aucun engin travailler et même aucun engin du tout sur le soi-disant chantier ! et c’est peu dire que la route aurait bien besoin d’être rénovée : par endroits, on n’atteint péniblement les 60km/h pour éviter les ornières et les nombreux « nids de nandous » de la route  (ils sont nettement plus gros que les nids de poule que nous avons connu sur la RT1…) ! La route est cependant très jolie, plus vallonnée que ce dont nous avions l’habitude, et surplombe la mer par endroits… et partout, toujours des petits autels à la gloire du Gauchito Antonio Gil, ou des petites crèches comme les appelle Zoé 😉

Ruta 3 entre Comodoro Rivadavia et Caleta Olivia

La ville de Caleta Olivia est aussi moche que sa copine Comodoro Rivadavia : avec les vents qui soufflent inlassablement, le dépotoir s’est étendu à toute une partie de la ville, et des puits de pétrole des alentours…

caleta olivia

Et contre toute attente, à la sortie de la ville, à quelques centaines de mètres des derniers puits de pétrole, au détour d’un virage, nous tombons sur une colonie de lions de mer à quelques dizaines de mètres de la route… Nous pouvons presque les toucher tellement ils sont proches… Ils sont très nombreux, dont beaucoup de mâles que nous n’avions pas eu l’occasion d’observer à la Péninsule Valdés : à la vue de leur  belle crinière dorée, on comprend parfaitement d’où ils tiennent leur nom ! Certains se baignent dans l’eau que l’on imagine aisément glaciale, sautent, se chamaillent… Nous avons du mal à décoller de cette colonie, malgré la fraicheur (il ne doit pas faire plus de 12°C) et la pluie !  

lions de mer à caleta olivia

Nous reprenons tout de même la route vers le sud, en direction de Jaramillo, petit pueblo de la province de Santa Cruz qui détient un trésor inestimable : une forêt pétrifiée, datant du Jurassique Supérieur, soit environ 150 millions d’années ! Attention, ce joyau n’est pas à la portée de n’importe quel quidam, et il faut pour l’atteindre, parcourir pas moins de 50 km de piste (c’est quand même la Ruta Provincial 49) en gravier, plutôt en bon état sur la majorité, mais qui nous prendra pas loin de 2 heures… le jeu en vaut largement la chandelle : très rapidement après être sortis de la Ruta 3, les paysages changent… on quitte la plaine de prairies rases et pelées pour trouver des plateaux volcaniques découpés aux couleurs chatoyantes : rouge, vert, mauve… la végétation est toujours aussi quasi inexistante, mais les reliefs sont magnifiques !

piste d'accès aux bosques petrificados

Quand nous atteignons enfin le site, classé Monument Naturel, nous sommes quasiment les seuls, les groupe de Brésiliens nous précédant étant sur le point de repartir… Les gardes nature prennent le temps de nous expliquer en détail, l’hypothèse la plus probable de la présence de cette forêt pétrifiée…

Jadis, une forêt luxuriante florissait en Patagonie (oui, je sais que c’est dur d’y croire au vu des paysages actuels, mais il faut avoir un peu d’imagination), dont de nombreux araucarias mirabilis, pouvant atteindre plus de 40 mètres de haut avec un diamètre moyen de 1,10 mètres et vivre plus de 1000 ans, faisant la grande joie des dinosaures, tels que celui qu’on a croisé à Trelew il y a quelques jours… Le climat du Jurassique était plutôt chaud et sans les Andes pour bloquer les nuages, l’humidité du Pacifique arrivait jusque dans ces contrées, créant un environnement propice à la croissance de plantes diverses et variées, et en particulier d’araucarias …

Mais bientôt, la tectonique des plaques est venue bouleverser ce havre de tranquillité (note de l’auteur : le côté paisible de la forêt est une hypothèse toute personnelle pour les besoins du récit…), et en même temps que les Andes se formaient un peu plus à l’ouest, de nombreux volcans sont entrés en éruption, générant des vents de plus de 300 km/h venant souffler ces majestueux araucarias comme des châteaux de carte… Là-dessus arrivèrent les nuages de cendres volcaniques qui recouvrirent tout sur le passage pour ne laisser qu’un paysage désolé… mais qui évitèrent ainsi le processus naturel de décomposition de ces araucarias…

Plus tard, en s’infiltrant dans le sol, l’eau de pluie s’est chargée de minéraux rencontrés dans les cendres volcaniques, et en particulier de la silice, qui finit par pénétrer dans toutes les cellules des arbres couchés et y cristalliser, les « pétrifiant » ainsi ! Ce phénomène peut donc être appelé indifféremment « pétrification » ou « silicification » !

A travers les âges, de nouvelles couches de sédiments se déposeront sur nos fameux arbres pétrifiés, les enfonçant chaque fois un peu plus profond… Puis l’érosion naturelle faisant son office, les arbres d’un autre temps se sont de nouveau retrouvés à l’air libre, mais pétrifiés cette fois ci !

Nous suivons le petit sentier de 2km qui serpente au milieu de ces troncs, impressionnants par leur taille et leur diamètre, mais aussi par les détails des nœuds et de l’écorce qui donnent l’impression d’être devant des arbres tout juste tombés à terre… Nous sommes émerveillés, époustouflés et sans voix devant cette merveille de la nature !

Bosques petrificados

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Notre instinct de géologue nous démange de rapporter un petit morceau d’arbre comme souvenir, mais les gardes nature ont été très clairs avant de nous laisser aller nous promener sur le chemin : aucun caillou ne doit sortir du site, et notre sac à dos sera fouillé dans ses moindres recoins à notre retour au petit musée à l’entrée !! Nous repartirons avec de nombreuses photos… et encore 2 heures de piste à parcourir pour atteindre la route asphaltée…

One Comment

  • Hélène et Jean-Paul

    Quelle drôle de forêt , il n’y a même pas de feuilles sur les arbres , n’est-ce pas , Agathe !
    Les parents vous font faire des choses bizarres , ah ces géologues !!! 🔨
    Bises à tous les quatre et bon vent pour la suite des aventures en Terre de Feu .

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