Valle Zapoteco de Tlacolula
C’est avant l’aube que nous quittons Villahermosa. Notre prochaine étape est la région d’Oaxaca, dans les montagnes au sud de Mexico, et nous avons devant nous un peu plus de 700 km à parcourir avec un dénivelé positif de quasi 1500 mètres !
Le trajet nous prendra 2 bonnes journées de route entrecoupée d’une petite pause baignade que nous devrons abandonner à contre coeur à cause d’un énorme orage !
Plus la route grimpe et plus le climat se fait sec et désertique. Adieu végétation luxuriante de la jungle, bonjour cactus et poussière !
Très rapidement, on commence à voir des champs de maguey, le nom local donné à l’agave qui sert à faire le mezcal. Et le long de la route s’enchainent les fabriques artisanales.

Nous nous arrêterons dans l’une d’entre elles pour connaitre le procédé de fabrication de cet alcool typique de la région :
– 10 ans après avoir été plantés, les coeurs de magueys, les piñas, sont récoltés dans les champs.
Une fois par an, sont également récoltés les piñas silvestres, les magueys sauvages dont les coeurs sont plus allongés, qui donneront des mezcals ayant des notes aromatiques de plantes.

– ensuite les coeurs sont cuits à l’étouffée pendant 7 à 8 jours dans un four enterrré avec des pierres chauffées au feu de bois.

– une fois cuits, les coeurs de maguey sont broyés par une meule en pierre d’une tonne tirée par un cheval, puis sont mis à fermenter avec de l’eau pendant une 10aine de jours.
Le liquide issu de la fermentation et la pulpe sont ensuite distillés deux fois dans des alambics chauffés au feu de bois pour donner le mezcal.

– enfin, le mezcal peut alors être consommé directement ou être vieilli en barrique pour donner le « mezcal reposado ».
A la mise en bouteille, un ver de maguey, un gusano, peut être ajouté et aurait, parait-il, des vertus aphrodisiaques !
A la dégustation, il est conseillé de croquer du chocolat pour décupler tous les arômes…

C’est alourdis de quelques bouteilles supplémentaires que nous poursuivons notre route jusqu’à Hierve El Agua, une formation géologique particulière de cascades pétrifiées, formées par des sources d’eaux saturées en minéraux.

La « cascada chica » a été artificiellement aménagée en bassins pour la baignade.
Naïvement, nous pensions que l’eau des bassins serait chaude en traduisant « hierve el agua », comme « l’eau qui bout »… en réalité, il faudrait plutôt le traduire par « l’eau qui bouillonne » puisqu’effectivement lorsque les sources jaillissent, l’eau bouillonne, mais elle est bien froide !!
Quand l’eau arrive à la surface, l’excès de minéraux est déposé comme pour les stalagtites dans les grottes, donnant ces formations drapées si particulières.


Les températures plus fraiches depuis que nous sommes montés en altitude et le petit vent frais nous dissuaderont de nous mettre à l’eau !
Mais nous ferons une jolie petite balade dans des paysages splendides oú nous croiserons lézards et cigales au milieu de nombreuses variétés de cactus.


Nous longerons même quelques canaux préhispaniques, servant à acheminer l’eau minéralisée lors de l’occupation zapotèque de la région.

Occupation zapotèque dont nous aurons un autre témoignage dans la ville de Mitla, avec le site archéologique du même nom, situé à une 20aine de kilomètres de Hierve El Agua.

Ce petit site, que seul Pierre visitera (les filles préféreront réaliser des activités plus artistiques au camping-car) abrite de jolis palais magnifiquement décorés par des frises géométriques en pierre dont les motifs (14 différents selon Lonely Planet et 7 selon Pierre) symbolisent le ciel, la terre, le dieu serpent à plumes et autres éléments importants de la culture zapotèque.

Cet ensemble de ruines, assez bien conservées, date de 2 ou 3 siècles avant l’arrivée des conquistadors espagnol, et était un centre religieux important.

Aujourd’hui la culture zapotèque est encore bien présente au Mexique et certaines traditions perdurent depuis des siècles, comme celle du tissage et de la teinture de la laine de mouton en vue de la fabrication de tapetes, ces tapis colorés qui peuvent aussi bien servir de tapis que de tapisseries.

Nous irons visiter l’atelier de Josefina Méndez López dans la petite ville de Teotitlán del Valle, qui nous montrera, avec sa maman Ermelinda parlant peu espagnol et surtout zapotèque, et son mari, toutes les étapes de leur fabrication.
Après achat, la laine de mouton brute est d’abord nettoyée à l’aide d’eau et de patate douce râpée, afin de la débarrasser de toutes les saletés.
La laine propre est ensuite cardée à la main à l’aide de 2 brosses métalliques. Toute la famille s’y essayera sous le regard amusé d’Ermelinda, qui pratique depuis 68 ans (elle a commencé à 10 ans !) et c’est franchement loin d’être facile…

Une fois démélée, il s’agit de filer la laine à l’aide d’un rouet artisanal. Là encore pas du tout fastoche : soit on serre trop et le fil trop fin se casse, soit on ne serre pas assez et le fil est trop épais… dans tous les cas, il faut une sacrée maitrise pour réussir un fil régulier !

Selon la couleur naturelle de la laine de mouton, certaines pelotes sont plutôt blanches, d’autres plutôt noires et même grises si on combine les 2 !
Pour les autres teintes, il est nécessaire de procéder à d’autres étapes.
Les différentes teintes de rouges, orangés et mauves sont réalisées à l’aide de cochenilles. Elles sont élevées sur des nopals, ces cactus en forme de raquettes, puis séchées et enfin broyées pour obtenir une poudre rouge, qui mélangée à de l’eau bouillante permettra d’obtenir un bain de teinture rouge. La couleur finale du fil dépendra de la couleur originelle de la laine : une laine sombre donnera plutôt du bordeaux alors qu’une laine plus claire donnera un rouge plus franc avec entre ces 2 teintes tout un camaïeu.

En acidifiant le bain de teinture avec du jus de citron, le mélange tourne à l’orangé.
En ajoutant une base, comme de la chaux éteinte, le mélange vire au mauve !

Pour les teintes bleues, c’est l’indigo qui est utilisé : la plante est d’abord mise à fermenter, puis on en tire une pâte qui est ensuite séchée pour obtenir un bloc. Selon les besoins, ce bloc est broyé puis mélangé à de l’eau bouillante pour réaliser le bain de teinture.
Le jaune, lui, peut être obtenu grâce au curcuma réduit en poudre ou à l’aide d’une infusion aux fleurs de soucis, fleurs qui remplacent nos chrysenthèmes à la Toussaint que l’on retrouve sur les autels des morts début novembre.

Et en combinant ces 3 couleurs primaires, le rouge, le bleu et le jaune, la palette de teintures est infinie…
Josefina nous réservera cependant une dernière surprise : en ajoutant un peu de chaux à la pulpe rouge de grenade, le mélange tourne au vert ! C’est ce qu’elle appellera la « bandera », le drapeau (sous entendu mexicain, composé de vert, de blanc et de rouge !) 😉
Les filles resteront émerveillées par les « tours de magie » de Josefina, surtout quand elle leur fera directement au creux de la main avec une cochenille fraiche écrasée : quand la chimie s’apparente à de la magie lorsque l’on a des yeux d’enfants !!
Il ne reste plus maintenant qu’à tisser les tapis, c’est le mari de Josefina qui nous en fera la démonstration sur son énorme métier à tisser, puis à réaliser les finitions, et là ce sont les filles de la maison qui s’y collent après l’école. C’est Gloria, 10 ans, qui nous montrera comment réaliser les torsades avec une adresse hors pair !

Après cette visite fort intéressante, nous ferons une dernière petite halte avant d’atteindre Oaxaca de Juarez, la capitale de l’état éponyme, pour aller admirer un des arbres les plus vieux au monde : un cyprès de Montezuma, âgé de plus de 2000 ans situé juste à côté de l’église de Santa Maria de Tule, et plus connu sous le nom de » Arbol de Tule ».
Avec ses 42 mètres de haut, ses 58 mètres de circonférence et sa masse de plus 600 000 tonnes, il apparaît comme l’être vivant ayant la plus grosse biomasse au monde !!
Il est effectivement immense, et il est quasiment impossible de le prendre en photo dans sa totalité 😉

Hélène BOUÉ
des merveilles de la nature et l’ingéniosité des humains pour utiliser les trésors à leur portée , le Mexique est décidément riche en découvertes de tout genre .
Zoé et Agathe profitent de leçons que nulle école n’aurait pu leur faire connaître , vivent les voyages en famille et en camping-car ! 😂
😘😘😘😘
Thomas
C’est clair que les tours de « magie » avec les couleurs est assez bluffant surtout à leurs âges! C’est l’école quelque part mais en beaucoup plus ludique et en mieux!!! 🙂